A propos de la grève générale

Dans son rapport d’activité à l’occasion de l’ Assemblée Générale du 10 mai dernier, Elyane Bressol, la Présidente de l’ Institut Cgt d’Histoire Sociale à déclaré (extraits):
<< En affirmant dès l’ouverture du 51 ème congrès que la grève générale ne se décrète pas, Philippe Martinez a fait un tabac! Il y a plus d’un apôtre de cette grève générale pour ne pas reprendre la formule et opter pour…une grève reconductible! Nous pouvons être d’accord pour partager une utopie, mais pas au nom de l’histoire! Contrairement à ce que ses partisans affirment, l’histoire nous enseigne que la grève générale illimitée est plus un mythe qu’une réalité. En France, elle n’ a jamais été utilisée, mis à part l’exception de la grève insurrectionnelle d’août 1944. Aussi, est-il erroné de dire que la grève générale illimitée a permis d’obtenir » des victoires historiques« . Ce n’est valable ni pour 1936, ni pour 1968 et a fortiori pour la Libération.
En 1936, la grève déclenchée après le succès du Front populaire ne concerne que le privé, sauf les banques. En effet, je rappelle que ni les fonctionnaires, ni les agents du service publics ne participent au mouvement.
En 1968, aucun appel ne fut lancé par la Confédération (ce qui lui fut reproché), avec un pic de 8 millions de grévistes « la grève fut généralisée » selon la formule de Georges Séguy.Et la mise en place d’un Comité national de grève ne fut que discutée, pas concrétisée.
Cela étant dit, il convient aussi de relever la place fondamentale de la grève générale dans l’ histoire de la CGT. René Mouriaux, dans une conférence en 2003 (à lire sur le site www.ihs.cgt.fr) , rppelle que la grève générale est une idée qui apparait à la Révolution française, qui fut préconisée par le syndicalisme anglais dès le milieu du 19 ème siècle , débattue au 3 ème congrès de l’Association internationale des travailleurs (1968). Le terme de grève générale s’impose à la fin du 19e siècle .
Ce mot d’ordre revêt des réalités diverses: grève dans une branche, appel à tous les salariés d’une grève de 24 heures et la grève générale interprofessionnelle et illimitée.
La jeune CGT en est partisane, en 1895, n’inclut-elle pas dans sa structure un Comité de la grève générale?
Et, le congrès suivant (1896, Tours) décide dde conduire une propagande intense en faveur de la grève générale. En 1902, le Congrès de la « seconde naissance » instaure une « commission des grèves et de la grève générale » . Malgré de vifs débats, cette forme de grève sera avancé comme moyen d’obtenir la journée des 8 heures. Et on le sait, elle n’aura pas lieu.
Au congrès de 1906, la conception révolutionnaire triomphe, la grève générale devient le moyen permettant d’ouvrir la voie à l’émancipation intégrale des travailleurs.A nouveau, l’idée est discutée comme moyen de préserver la paix face aux dangers de la guerre. Jaurès en est un partisan convaincu, la CGT déclare alors « la guerre à la guerre » . Mais une fois encore, le mot d’ordre de grève générale ne sera pas lancé et c’est le début de l’effacement de sa conception syndicale révolutionnaire.
Plus tard, en pleine guerre froide, à la suite de la manifestation anti Ridgway (mai 1952), le mot d’ordre lancé par la Confédération sera un puissant échec.
Une fois de plus, l’histoire ne nous fournit pas de solution pour le présent, elle nous aide à comprendre. POur autant, la question des conditions à réaliser la lutte unitaire est légitimement dans de nombreuses têtes.>>
ELyane Bressol