Conférence de presse pour le lancement du roman graphique

A l’occasion de la présentation publique de notre projet de Livre Graphique, nous avons organisé une Conférence de presse, dont vous trouverez ci dessous la présentation faite par notre Président Jacky Maussion.

Nous sommes ici au Havre, « l’affaire Jules Durand » n’est donc pas, pour vous, une inconnue.
Affaire Dreyfus du monde du travail ou l’affaire Dreyfus du pauvre, il y a plusieurs manières, sans doute, de présenter l’injustice dont fut victime Jules Durand.
Au cours de son émission « La fabrique de l’histoire », France Culture y a consacré un documentaire. Jacques Defortescu, Pierre Lebas, dirigeants de notre Institut, anciens secrétaires de l’Union Locale du Havre des syndicats CGT, Johan Fortier, secrétaire du syndicat des dockers du Havre et Jean-Pierre Castellain de l’Association des Amis de Jules Durand ont été mis à contribution sous forme de témoignages.
La radio du service public avait, à l’occasion, publié un résumé succinct de « l’affaire Durand » : « Le 15 novembre 1910, Jules Durand est condamné à avoir la tête tranchée par la cour d’assises de Rouen.
Le jeune secrétaire du syndicat des dockers charbonnier du Havre était accusé d’avoir appelé à se débarrasser des « jaunes », ceux qui ne font jamais grève contrairement à leurs collègues depuis trois semaines.
A la suite d’une rixe un soir sur le port à la sortie des bistrots un « jaune » trouve la mort.
La compagnie transatlantique saisit cette belle occasion d’en finir avec cette grève et organise l’instruction dans ses propres locaux.
Lorsque le verdict tombe, l’affaire devient nationale, Jaurès s’insurge de cette machination dans les colonnes de « l’Humanité », les dockers du monde entier envoient pétitions et messages de soutien pour que Durand soit innocenté.
Il le sera, mais trop tard. Devenu fou, il trouvera la mort à l’asile de Rouen (Sotteville) probablement inconscient que la vérité avait été rétablie.
Cependant les auteurs de cette machination ne furent jamais inquiétés ».
« L’affaire Durand », reste pour l’essentiel, encore aujourd’hui, peu connue au-delà de l’agglomération havraise.
J’ai découvert « l’affaire Durand », ici au Havre, au début des années 60 grâce à Armand Salacrou. Délégué à un congrès de l’Union Départementale des syndicats CGT, j’avais assisté, un soir, à une représentation de la pièce intitulée « Boulevard Durand ».
Ecrite en 1960, cette pièce d’Armand Salacrou garde toute sa pertinence et toute son actualité. Elle fut d’ailleurs représentée en septembre et octobre 2007 au Havre et en 2008 à Rouen, par la troupe amateur du théâtre de l’Éphémère, composée essentiellement de militants ou d’adhérents CGT, à l’occasion des 100 ans de l’ Union locale du Havre. (voir le Fil rouge N° 29 & 30)
Plusieurs ouvrages ont été publiés :
Vie et folie de Jules Durand en 1981, mémoire de psychiatrie par le docteur Jean-Pierre Avenel.
Un nommé Durand, essai bibliographique écrit en 1984 par Alain Scoff.
Les quais de la colère en décembre 2004 par Philippe Huet, l’un de vos confrères. Journaliste à Paris-Normandie et auteur de polars. Il s’agit d’un roman, écrit avec le style du romancier : « Loin des privilèges, des capitaux et des places boursières, les débardeurs vivent un véritable enfer.
Rongés par la tuberculose, minés par l’alcool, enfermés dans un ghetto de misère, les charbonniers sont la lie du port, parias de la classe ouvrière…Sauf un, révolutionnaire idéaliste et buveur d’eau, surnommé « le curé », Jules Durand s’engage chez les charbonniers, reprend en main leur syndicat, devient leur leader. Effarés de voir une cohorte de clochards dépenaillés se transformer en une troupe organisée, les maîtres du charbon n’ont plus qu’une idée : abattre cet homme qui les met en danger. Par tous les moyens. »
Enfin suite aux journées d’études qui ont eu lieu en novembre 2013, un ouvrage vient d’être édité sous la direction de John Barzman de l’Université du Havre et de Jean-Pierre Castellain des Amis de Jules Durand. Il s’intitule : Jules Durand, un crime social et judiciaire.
Dans lequel nous avons d’ailleurs apporté notre contribution grâce à notre secrétaire Jacques Defortescu qui a rappelé sur une quinzaine de page ce que fut de 1910 à 1912, la prise en compte par la Cgt de l’affaire Durand et les conséquences de la répression.
Notre objectif avec l’édition d’un livre illustré part de la même démarche, mais il comprend une part non négligeable d’originalité que je voudrais souligner. Nous avons demandé à un membre du conseil d’administration de notre Institut, Alain Bozec, de coordonner et de suivre toutes les étapes de la concrétisation de cette réalisation.
Édité par les « Éditions de l’Atelier », sa diffusion sera nationale. La forme et le contenu de cet ouvrage s’adresse à tous les publics.
Autre originalité et pas des moindres, la publication d’un tel ouvrage a été rendue possible grâce à un partenariat entre notre Institut et le syndicat des dockers du Havre. Ce livre illustré comprendra donc, naturellement, une contribution sous une forme écrite, des dockers du Havre. Ces derniers, très attachés à cette histoire, à leur histoire, vont ainsi contribuer à faire en sorte qu’un large public connaisse enfin « L’affaire Durand ».
Nous avons sollicité un écrivain et un dessinateur.
Roger Martin, auteur d’une trentaine d’ouvrages connaît bien Le Havre. Il est, par exemple, l’auteur des « Contes de l’évasion ordinaire », livre publié en 1992 avec le Comité d’entreprise des ACH.
Lionel Makowski, dit « Mako
», croquera les personnages et l’environnement. Il a produit plusieurs bandes dessinées, dont quelques-unes avec l’écrivain Didier Daeninckx.
Avant de vous laisser la parole, je vais citer René Coty, avocat de Jules Durand et ancien Président de la République : « Jules Durand gênait car c’était un homme intègre, un pur, un apôtre et je n’ai pas l’habitude de galvauder mes mots ».